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« Bec et Ongles – suspended » de Bastien David.

Éclairage Par Hae Sun Kang, le 02/01/2024


L
e 13 janvier à l’Ircam, Hae-Sun Kang sera l’interprète de Bec et Ongles – suspended, « œuvre-installation » pour violon et électronique du jeune compositeur français Bastien David. La violoniste nous livre ses premières impressions sur cette pièce tout en suspension et…extension.   

Quand je joue Bec et Ongles — suspended de Bastien David, j’ai du début à la fin le sentiment d’être moi-même suspendue, comme perdue dans les nuages. Non pas au sens de « distraite » ou « ailleurs », mais comme dans un avion lorsqu’il traverse une épaisse couche de nuages : comme si j’étais un peu nulle part. C’est exactement ce que Bastien décrit dans un passage de sa note de programme en forme de poème : je me sens « suspendue entre ciel et sol ». C’est d’ailleurs un sentiment très intime pour moi : il n’y a que dans ces « nulle part » là que je me sens bien. Peut-être est-ce lié à ma propre vie, partagée toujours entre la France et la Corée…
Je ne suis pas seule à être suspendue : la pièce a aussi un aspect « installation » et, au-dessus de la scène sur laquelle je joue, Bastien suspend plein de violons, comme une pluie de violons « suspendue ».
Il existe une première version de la pièce, pour violon seul (sans électronique), intitulée Bec et Ongles, que j’ai travaillée en profondeur avec Bastien. C’est de ces ateliers, et des discussions qui se sont ensuivis, qu’est née la deuxième version : si le principe de l’œuvre est inchangé, Bastien y adjoint une mise en espace, donc, mais aussi de l’électronique. La partie de violon elle-même a évolué, et je trouve que le résultat est plus délicat, plus fragile encore que la version d’origine. Techniquement, la pièce n’est pas difficile, mais cette fragilité exige un investissement rare pour en faire ressortir toute la magie.

Propos recueillis par Jérémie Szpirglas

Photo © Franck Ferville