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« sonic eclipse » de Matthias Pintscher.

Éclairage Par Jean-Christophe Vervoitte, le 27/10/2022

Jean-Christophe Vervoitte sera le 1er novembre à Berlin pour jouer le cycle « cosmico-musical » sonic eclipse de Matthias Pintscher. L’occasion pour le corniste de partager son expérience d’une œuvre toute en éclipse…instrumentale.    

Ce qui m’a tout de suite frappé dès les premières répétitions de sonic eclipse, c’est le défi technique que cette œuvre représente. Quand on découvre la partition, on est surpris par sa volubilité et sa difficulté tactile. C’est une pièce qui exige énormément de travail et de temps pour « l’apprivoiser » ainsi qu’une endurance et une puissance rares. S’agissant de l’écriture pour cor, le langage qu’y déploie Matthias Pintscher fait abstraction des caractéristiques techniques de l’instrument, notamment sur le plan des registres — avec, par exemple, des cadences qui commencent dans le suraigu et finissent dans le grave extrême, entrecoupées d’élans de virtuosité. On pourrait presque penser qu’elle a été écrite indépendamment des contingences techniques de l’instrument. Cependant, passée cette première impression, on arrive progressivement à s’affranchir de ces difficultés pour arriver à une forme de naturel dans l’exécution. Comme si on faisait sauter les verrous de l’impossible. Résultat : le cor qu’on y entend ne ressemble pas vraiment à celui qu’on a dans l’oreille habituellement.

L’idée d’éclipse, se retrouve dans le dispositif même de la pièce. Dans le premier mouvement, je suis dans l’orchestre et j’accompagne le trompettiste qui est alors soliste — comme un astre masqué par un autre. Dans le deuxième, le trompettiste réintègre les rangs de l’orchestre tandis que j’en sors — comme si l’astre caché sortait de l’ombre pour s’interposer aux yeux de l’observateur. Enfin, dans le final, nous sommes tous les deux mis en avant. L’idée de cyclicité et de révolution planétaire se retrouve également dans la récurrence de certaines figures musicales, qui reviennent périodiquement comme ces comètes qui sortent une fois tous les 500 ans des profondeurs du cosmos pour venir se réchauffer près du soleil. Matthias n’hésite pas à jalonner ainsi sa partition de matériau thématique immédiatement reconnaissable.



sonic eclipse est un précipité du style musical de Matthias, avec notamment une très belle orchestration, vivante et transparente, avec des couleurs fascinantes et des rythmiques très définies. C’est une œuvre facile d’accès pour tous les publics, virtuose et spectaculaire. Raison pour laquelle, sans doute, nous l’avons beaucoup jouée ces dernières années, toujours avec succès : elle est devenue la carte de visite de l’Ensemble intercontemporain avec Matthias Pintscher à sa tête.


Propos recueillis par Jérémie Szpirglas 

 

Et aussi un reportage vidéo sur sonic eclipse de Matthias Pintscher 

Photos © EIC