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Une première saison bien remplie. Entretien avec Renaud Déjardin, violoncelliste.

Entretien Par Jean-Christophe Montrency, le 04/07/2022


Depuis qu’il a rejoint l’Ensemble intercontemporain en début d’année, Renaud Déjardin a pu découvrir l’étendue du répertoire contemporain et multiplier les expériences, dans tous les formats. Le violoncelliste revient sur ces premiers mois denses et intenses.

Renaud, quel accueil vous ont réservé vos nouveaux collègues ?
Exceptionnellement chaleureux ! Depuis la finale du concours, au cours de laquelle je me suis senti encouragé par l’ensemble du jury, jusqu’aux premières répétitions, où ils m’ont manifesté leur bonheur qu’un nouveau violoncelliste les rejoigne, ce fut incroyable et j’en suis très touché.

Comment se sont passés vos débuts à l’Ensemble ?
Sur les chapeaux de roue ! Après une première série dans le cadre du Festival Présences autour de Tristan Murail, j’ai fait mes premiers pas dans la Symphonie de chambre no. 1 de Schoenberg, que je n’avais jamais jouée. Quelle impression délicieuse, d’être ainsi entouré de musiciens qui semblent connaître la partition comme leur poche ! Après quoi j’ai enchaîné sur un quatuor de Xenakis, puis les trios à cordes de Schoenberg et de Webern… Comme vous voyez, je suis vite entré dans le vif du sujet !



Quels souvenirs gardez-vous de votre premier service et de votre premier concert ?
J’ai tout de suite été impressionné par la qualité de l’écoute globale de chacun : j’avais un peu le sentiment que chaque musicien était chef d’orchestre, c’est-à-dire capable de cerner et de régler efficacement tous les problèmes posés par la partition. Impressionné aussi par l’atmosphère ultra-professionnelle et en même temps totalement décomplexée ! C’est-à-dire que le plaisir musical et sonore, le bonheur de l’instant partagé au concert, priment sur les contingences techniques individuelles, que chacun sait pouvoir gérer au mieux.

Quels ont justement été les enjeux principaux pour vous en tant que musicien depuis votre arrivée ?
Le premier enjeu, de taille, concernait les œuvres de musique de chambre : un répertoire que j’avais très peu abordé jusqu’ici (du moins dans le contemporain) et dans lequel je me suis senti tout à coup tout petit. Mais j’ai assez vite réussi à me débarrasser de mes complexes de « faux débutant », ce qui m’a permis de connaitre de vrais moments de bonheur. Bien que le répertoire contemporain paraisse de prime abord plus ardu, la question, in fine, est la même que pour le répertoire ancien : comment puis-je ouvrir mes oreilles plus grandes encore ?



Quels ont été pour vous les moments forts de cette première saison avec l’Ensemble ?
Rencontrer et travailler directement avec des compositeurs tels que Tristan Murail, Michaël Jarrell ou Philippe Manoury est une chance inouïe.

Le Trio de Schoenberg avec Jeanne-Marie Conquer et Jack Stulz fut un peu une révélation, notamment au concert. Dans cette œuvre, les gestes ont une forme de spontanéité qui sollicite en permanence l’imagination des interprètes.
Le dernier concert a été comme une apogée, avec les Cantates de Webern travaillées dans le raffinement expressif avec notre directeur musical, la création de Johannes Maria Staud, compositeur très poétique dont j’admire la sincérité et une forme d’évidence du discours, et, bien sûr, la rutilante Passacaille pour Tokyo de Philippe Manoury (photo ci-dessous), avec Hideki Nagano en coloriste… et en athlète !


 

Qu’est-ce qui vous fait le plus envie la saison prochaine ?
J’ai hâte de jouer des compositeurs que je n’ai encore jamais joués : Helmut Lachenmann, Unsuk Chin, mais aussi Matthias Pintscher, qui dirigera ses propres œuvres — une occasion à ne pas manquer pour sa dernière saison avec nous.

Il y aura aussi la Suite lyrique de Berg, le Pierrot Lunaire de Schoenberg, Vox Balanae de Crumb — que des premières pour moi — et bien sûr le Concerto pour violoncelle de Ligeti, dont je tiendrai la partie soliste.

 

Photos (de haut en bas) : photo 1 © Franck Ferville / photos 2 et 3 © Anne-Elise Grosbois / photo 4 © Quentin Chevrier