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Toshio Hosokawa : “The Flood”

Éclairage By Jéremie Szpirglas, le 08/09/2020

Revenir à l’essentiel : voilà le thème de notre concert du 16 septembre, qui ouvre cette nouvelle saison si particulière à la Philharmonie de Paris. Parmi les essentiels, la création figure bien entendu en bonne place et c’est une commande passée au japonais Toshio Hosokawa, The Flood, que l’Ensemble intercontemporain créera pour l’occasion.  

 

Né en 1955 à Hiroshima, Toshio Hosokawa se forme entre Tokyo, Berlin et Fribourg-en-Brisgau, où il a notamment pour professeur le compositeur suisse Klaus Huber. Ce dernier l’invite vivement à approfondir sa connaissance de la musique japonaise (musique de cour, gagaku, nô, etc.) pour y puiser son inspiration, autant que dans la tradition européenne. Suivant le sillage de son aîné Toru Takemitsu, Hosokawa développe ainsi une œuvre dans une riche dialectique entre occident et orient. Si les problématiques archétypales de la création européenne (l’écriture du temps, l’attention extrême aux textures…) n’ont pas de secret pour lui, c’est toujours dans le cadre d’une réflexion très fortement emprunte de l’esthétique japonaise qu’il les creuse. Prenant souvent la forme d’un lent voyage intérieur, cultivant une relation étroite à la nature, ses œuvres se vivent comme une forme de méditation suspendue, dégageant une véritable aura spirituelle.

Le défi que représente cette commande de l’Ensemble intercontemporain, destinée à clôturer le cycle Genesis, lui va donc comme un gant. Initiée en 2016 à l’occasion des 40 ans de l’Ensemble, cette série consistait à l’origine en sept commandes, correspondant respectivement aux sept journées de la Création biblique. Une « méta-création », en somme, qui permettait à chacun des sept compositeurs sollicités de donner leur vision à la fois de ce texte fondateur et du processus créatif en lui-même — création sui generis, renouvellement ou extrapolation de matériau déjà existant, table rase… 

Dans The Flood, comme son titre l’indique, Toshio Hosokawa prolonge le récit de la Création pour s’intéresser au Déluge : celui, décrit aux chapitres 6 à 8 de la Genèse, que Dieu déchaîne sur les descendants d’Adam et Ève dont il ne peut que constater la corruption. Seuls seront épargnés Noé, sa famille et les animaux embarqués dans son arche.

Pour un japonais tel que Toshio Hosokawa, le déluge est un sujet familier. « Il y a eu bien sûr le terrible tsunami de 2011, de dimension biblique, écrit-il, mais ce n’est pas la seule raison. Notre pays est souvent dévasté par des typhons, des pluies diluviennes et des inondations. Les déluges, lorsqu’ils atteignent des proportions dramatiques, nous font prendre conscience de la puissance de la nature et suscitent en nous un sentiment de peur et même un esprit de révérence. » The Flood se présente comme une succession de« vagues sonores créées par des crescendos-decrescendos. La spirale sonore qui naît ainsi provoque en nous un sentiment de peur et en même temps nous laisse purifiés. »

Photo © Bernd WeiBbrod/dpa/Alamy Live News