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De vrais petits bijoux…

Éclairage By Claire Booth, le 28/11/2019

Elle sera la chanteuse soliste dans les deux œuvres d’Oliver Knussen au programme concert du 10 décembre 2019 à la Cité de la musique. Éclairage de la soprano anglaise Claire Booth, qui fût très proche du compositeur et chef d’orchestre écossais, sur ce qu’elle qualifie de « vrais petits bijoux »  : Requiem: Songs for Sue et O Hototogisu!

 

J’ai rencontré Olly en 2000, alors qu’il enseignait la composition dans le cadre du festival d’Aldeburgh. Je connaissais sa musique et j’avais à cœur de faire bonne impression. Un jour, je l’ai quasiment séquestré dans une salle de répétition pour lui chanter ses Whitman Settings d’un bout à l’autre. J’ai eu la chance que quelque chose, dans ma voix ou dans mon attitude peut-être, capte son attention, et ce fut le point de départ d’une collaboration longue et suivie. O Hototogisu! (2017) est la deuxième pièce qu’Olly a composé spécialement pour moi, et, à bien des égards, elle figure comme un pendant à l’univers sonore de l’autre pièce de Knussen que j’ai créée, son Requiem: Songs for Sue (2005-2006). Le Requiem donne un sentiment d’enracinement automnal, la voix faisant office de narrateur. C’est une pièce incroyablement émouvante — et pas seulement parce qu’elle a été composée à la mémoire de sa femme Sue qui venait de mourir : le choix des textes est bien sûr très personnel, intimement lié aux sentiments qu’il avait pour elle.

O Hototogisu!, en revanche, m’a toujours paru plus élusive, avec ce jeu entre la voix et la virtuose partie de flûte qui va et vient entre le premier plan et l’arrière-plan sonores. L’univers timbral en est assurément « d’un autre monde ». Lors d’une tournée au Japon en 2016, au cours de laquelle nous avons joué sa musique, Olly s’était lancé corps et âme dans une véritable folie d’achat d’instruments de percussion japonais. Le son si remarquable des woodblocks, qu’on entend d’un bout à l’autre de la pièce, est très éloquent dans son évocation d’un questionnement, d’une quête primordiale. La pièce toute entière (qui n’est hélas, en vérité, que la première partie d’une composition qui devait être bien plus vaste) est portée par un sentiment d’élévation, d’espoir, d’émerveillement… ce qui, au vu des circonstances de la mort inopinée d’Olly, semble plus pertinent encore, donnant à O Hototogisu! une envergure émotionnelle qui rivalise avec son propre Requiem. Chanter cette pièce est encore aujourd’hui un formidable honneur à mes yeux, comme le reste de la musique d’Olly : ce sont là de parfaits petits bijoux, qui méritent le plus large public possible.

> Extrait de Requiem: Songs for Sue d’Oliver Knussen

 

Photo © Sven Arnstein