Couvrant toute la vie créatrice du compositeur, l’œuvre pour piano de Pierre Boulez tient tout à la fois du journal intime, du cahier d’esquisses et du laboratoire. Au sein de ce corpus, la Sonate no 2 et le deuxième livre de Structures font date. C’est en effet avec la Deuxième Sonate que la personnalité de Boulez s’impose sur la scène de la création française, alors marquée par le développement du sérialisme. Exigeant de l’interprète une virtuosité hors du commun, cette partition touffue ne fait toutefois pas du passé table rase : elle doit en effet beaucoup au modèle de la sonate beethovénienne, à la fois dans sa forme et dans son écriture contrapuntique d’une grande densité. D’après le musicologue canadien Jonathan Goldman, « Boulez réalise en quelque sorte dans cette Sonate le vœu prononcé dès 1948, selon lequel la musique « doit être hystérie et envoûtement collectifs, violemment actuels ».
Avec les deux livres de Structures, c’est l’inscription de Pierre Boulez et de son travail de composition dans les pensées philosophique, littéraire ou des arts plastiques qui est mis en avant : le courant structuraliste est alors en pleine structuration ! Structures, c’est aussi une étape importante dans l’évolution esthétique du compositeur : celle de l’extension de la série aux quatre composantes sonores (hauteurs, durées, attaques, intensités) et l’application de son principe à l’espace acoustique et formel. Cette tentative — « non sans absurdité » comme le dira plus tard le compositeur — participe d’une volonté d’unifier le discours. La radicalité de la pensée et la rigueur de l’écriture ne doivent toutefois pas faire oublier la sensualité extrême que réserve la musique de Boulez à qui voudra bien y prêter l’oreille : les déflagrations convulsives, les soubresauts spasmodiques, l’ivresse sonore nous rappellent que, durant ces années, le piano était pour Boulez « l’instrument même du délire ».
Distribution-
Hidéki Nagano piano
Dimitri Vassilakis piano -
Dans le cadre du Suntory Hall Summer Festival
Cette tournée a reçu le soutien de L’institut Français et de la Ville de Paris.