New Music Week à Shanghai. Entretien avec Deqing Wen, compositeur.
Entretien
C’est l’un des grands événements de ce début de saison 2015-16. Du 22 au 25 septembre l’Ensemble sera en Chine pour participer à la New Music Week organisée par le Conservatoire de Shanghai. Fondateur et directeur artistique d’un festival qui se développe un peu plus tous les ans, le compositeur et pédagogue Deqing Wen partage avec nous son expérience de la vie musicale contemporaine de son pays.
Vous avez effectué votre formation en Chine, en Europe et aux Etats-Unis. Comment articulez-vous ces deux traditions musicales dans votre propre musique ?
J’ai en effet étudié la composition en Chine, en Suisse, en France ainsi qu’aux Etats-Unis, en tant que « visiting scholar ». Profondément inspirée et influencée par la culture chinoise, particulièrement la philosophie, la peinture et la calligraphie, ma musique présente des traits typiquement chinois, mais traités d’une façon très personnelle, et passés au crible d’une technique occidentale complexe. Ainsi ai-je trouvé une sorte d’équilibre.
Extrait n°1 de The Sound Shining, pour erhu et ensemble de Deqing Wen
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De même, dans le cadre de vos activités de pédagogue, comment intégrez-vous ces différentes dimensions culturelles de votre formation ?
Il y a hélas très peu de concerts de musique contemporaine en Chine. Le festival New Music Week que j’ai créé est l’un des plus importants vecteurs pédagogiques quant à la diffusion de la musique contemporaine dans le pays. L’influence de l’événement touche naturellement le conservatoire et le public de Shanghai, mais aussi celui des autres grandes villes chinoises, telles que Nan Jing, Beijing, Wu Han, Hangzhou, Hong Kong …
Parallèlement à la direction du festival, je m’occupe également d’inviter de nombreux professeurs, compositeurs et musicologues d’autres villes en Chine ou d’autres pays, pour donner conférences, cours et lectures au Conservatoire de Shanghai. J’ai aussi ouvert un CDMC (Centre de Documentation sur la Musique Contemporaine) au Conservatoire de Shanghai en partenariat avec le CDMC de Paris.
Extrait n°2 de The Sound Shining, pour erhu et ensemble de Deqing Wen
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De manière plus générale, quelles relations la scène musicale contemporaine chinoise entretient-elle selon vous avec la scène musicale occidentale ?
Très fortes ! La plupart des œuvres contemporaines chinoises sont jouées par des musiciens occidentaux sur des scènes américaines ou européennes. Le grand répertoire de la musique contemporaine peut parfois être entendu à Shanghai, Beijing, Chengdu ou Nanning, mais rares sont les ensembles qui programment la nouvelle musique. Quand il s’agit de compositeurs chinois, celle-ci est du reste souvent composées pour des instruments traditionnels chinois.
Quand et comment est née la New Music Week ?
En 2007, M. Liqing Yang, alors directeur du conservatoire de Shanghai, m’a invité pour y enseigner l’analyse et la composition. À mon arrivée, aucun concert de musique contemporaine n’était organisé par l’institution, ce que je n’ai pas supporté. C’est ainsi que j’ai créé le festival New Music Week en 2008.
Après des débuts difficiles entre 2009 et 2011, nous en sommes aujourd’hui à la huitième édition qui bénéficie de conditions nettement meilleures. Si notre public comptait environ deux mille personnes les premières années, nous avons progressivement atteint les huit mille personnes lors de la dernière édition en 2014.
Signe de cette embellie, deux grands orchestres symphoniques (le Shanghai Philharmonic Orchestra et le Shanghai Symphony Orchestra) assureront cette année les concerts d’ouverture et de clôture du festival dans la grande salle du Shanghai Symphony Orchestra.
Quels sont les grands thèmes de cette édition 2015 ?
Avant tout le « grand répertoire » de la musique contemporaine. Nous aurons des concerts portraits de Beat Furrer, Chen Yi, Luciano Berio, Karlheinz Stockhausen, Arvo Pärt, Gérard Grisey, etc. En tout, 12 concerts avec pas moins 9 créations mondiales. A cela, il faut ajouter 5 conférences, 2 master-classes et un concours de critique musicale.
Que représente à vos yeux la présence de l’Ensemble intercontemporain cette année ?
L’Ensemble intercontemporain est l’un des meilleurs ensembles de musique contemporaine au monde et c’est la première fois qu’il se présentera sur la scène musicale contemporaine chinoise. La notoriété du festival New Music Week nous permet d’inviter des ensembles internationaux de très haut niveau et d’offrir ainsi au public chinois l’occasion d’entendre les meilleures interprétations de cette musique.
L’Ensemble sera dirigé et consacrera l’un de ses concerts au compositeur Beat Furrer (photo ci-dessous). Quels aspects de son œuvre avez-vous voulu mettre en avant ?
La personnalité, la qualité et la beauté de sa musique. D’autant plus que sa musique n’a pas encore été jouée en Chine.
Photos (de haut en bas) : portrait Deqing Wen (c) Yuan Xiluo / Beat Furrer (c) Luc Hossepied pour l’Ensemble intercontemporain
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