Entretien avec Victor Hanna, percussionniste
Entretien
Le 11 juin prochain, entre deux classiques de la musique du XXe siècle, Mouvement (-vor der Erstarrung) d’Helmut Lachenmann et Répons de Pierre Boulez, le percussionniste Victor Hanna interprétera Assonance VII pour percussion solo de Michael Jarrell. Une œuvre atypique, toute en douceur et en finesse, dont il nous donne un avant-goût…
Assonance VII va un peu à rebours de l’image qu’on peut se faire d’une pièce pour percussion solo…
Assonance VII occupe effectivement une place à part dans le répertoire de la percussion solo. C’est une musique douce, subtile, où les timbres et les couleurs instrumentales priment sur la virtuosité technique. Michaël Jarrell installe une série de motifs sonores qui sont autant de repères pour l’auditeur et dont il jalonne toute la pièce avec de légères variations. J’aime beaucoup jouer cette œuvre : elle me donne l’impression d’une image qui s’étire, se déforme, se transforme, comme une distorsion de l’espace-temps. Michaël Jarrell fait partie de ces rares compositeurs d’aujourd’hui dont la maîtrise des percussions est incontestable. La précision de son écriture et son exigence sont très stimulantes. J’ai eu la chance de travailler avec lui et son aide m’a été précieuse pour déchiffrer ses intentions musicales, aborder la temporalité du discours et en trouver le mouvement…
Au même programme, le 11 juin, nous entendrons Répons de Pierre Boulez et Mouvement (-vor der Erstarrung) d’Helmut Lachenmann : comment ces trois pièces se « répondront-elles » ?
Les trois compositeurs de ce concert ont une approche très différente des percussions. Néanmoins, j’ai le sentiment de retrouver dans Répons la même idée d’un matériau en constante évolution que dans Assonance VII, ainsi qu’une écriture d’ornements, de figures. Les deux pièces témoignent d’une grande attention portée à la perception du temps, ce qui leur donne une forme de « rituel ». D’un autre côté, je pense qu’on ne peut pas composer une œuvre pour percussion solo sans songer à la « chorégraphie » de l’interprète. En ce sens, Assonance VII est proche de Mouvement (-vor der Erstarrung) : ce sont toutes deux des musiques du geste. Le percussionniste évolue dans sa « cage dorée »… jusqu’à épuisement.
Cette « cage dorée », justement, sera placé sur la scène de l’immense Philharmonie de Paris : que vous inspire cette démesure ?
J’avoue que l’idée m’excite ! Ayant eu la chance de jouer déjà dans cette salle avec l’Ensemble, j’ai eu l’occasion d’apprécier son acoustique qui, j’en suis sûr, saura mettre en valeur les belles assonances de Jarrell ! Quant à l’expérience proposée au public, elle est passionnante : écouter dans le fil d’un même concert une œuvre pour un soliste placé au centre de la salle (Assonance VII ) aussitôt suivie d’une œuvre pour six solistes répartis autour du public (Répons)…
Photos (c) Luc Hossepied pour l’Ensemble intercontemporain
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